lundi 29 octobre 2012

La pression sur les ressources, facteur de crises écologiques et sociales en Méditerranée




Les vingt-deux pays et territoires riverains qui bordent la Méditerranée abritent 450 millions d'habitants.

L'organisation non gouvernementale canadienne Global Footprint Network estime que le déficit écologique autour de la Méditerranée accroît les pressions exercées sur les écosystèmes et alimente les crises économiques, elles-mêmes sources de troubles politiques et sociaux.

Selon un rapport de l'ONG – "Tendances de l'empreinte écologique méditerranéenne" –, publié à l'occasion d'un colloque qui s'est tenu, les 1er et 2 octobre à Venise, en Italie, "entre 1961 et 2008, la population croissante ainsi que les tendances en matière de  consommation ont fait tripler la demande régionale de ressources renouvelables et de services écologiques".

L'empreinte de la région a ainsi dépassé les actifs écologiques locaux disponibles de 150% en 2008. "Et l'habitant moyen a actuellement une empreinte écologique de 3,1 hectares globaux (hag) alors que seul 1,3 hag par personne sont disponibles dans la région."
En 2008, l'empreinte de la région a dépassé les actifs écologiques locaux disponibles de 150%.
Cette réalité n'est pas spécifique à la Méditerranée. Les habitants de la planète consomment plus de ressources naturelles que celle-ci ne peut en produire. Ce déficit écologique s'aggrave Global Footprint Network : le jour "du dépassement", c'est-à-dire la date à laquelle les ressources renouvelables de la planète produites dans l'année ont été entièrement consommées, a été atteint le 22 août en 2012.
Cette date à partir de laquelle l'humanité vit "à crédit" intervient chaque année un peu plus tôt. En 2000, c'était le 1er novembre. Et le 31 décembre en 1986, année de création de cette "date du dépassement ".
"Ce déficit écologique est dangereux, il risque de nuire à la sécurité économique des pays du bassin méditerranéen, ainsi qu'à leurs capacités à garantir le bien-être de leurs citoyens", explique Mathis Wackernagel, président du Global Footprint Network. Du Portugal à l'Egypte, du Maroc à la Syrie, les vingt-quatre pays du bassin méditerranéen étudiés sont passés de créditeurs à débiteurs. A une exception près, le Monténégro, pays pour lequel les données sont incomplètes.
La vallée d'Akkuyu, dans la province turque de Mersin, au bord de la Méditerranée.
Les cinq pays les plus débiteurs étaient, en 2008, l'Italie, l'Espagne, la France – ces trois pays contribuant à eux seuls à plus de 50 % de l'empreinte écologique régionale –, la Turquie et l'Egypte. Ce lien entre crises écologique, économique et politique est souligné par les auteurs du rapport: "L'écart grandissant entre l'offre et la demande rend la stabilité de la région fortement dépendante de la disponibilité des actifs écologiques situés hors du bassin méditerranéen, écrivent-ils, ainsi que de sa capacité à financer l'accès à ces ressources et aux services produits."
Deux périodes sont distinguées : entre 1961 et 1970, le déficit écologique méditerranéen était compensé par l'apport d'autres écosystèmes extérieurs à la région. De 1971 à 2000, le monde est entré dans une phase de surconsommation."Les marchés internationaux ont réagi, contribuant à l'augmentation des prix de ressources mondiales en diminution", analyse le Global Footprint Network.
"APPROVISIONNEMENT INSTABLE"
Les crises se combinent et, explique M. Wackernagel, "les pays dépendant d'autres nations se rendent compte que leur approvisionnement en matière de ressources devient instable et aléatoire, ce qui a de profondes implications économiques". La part moyenne du revenu mondial par habitant du bassin méditerranéen reculant nettement, ces pays sont dans une situation économique difficile pour accéder à ces ressources mondiales limitées.
A ce jour, la région méditerranéenne ne peut renouveler que 40% de sa demande en services et ressources naturels, et l'importation de biens représente un quart de ses besoins. "En matière de déchets, précise le rapport, les habitants de la région émettent bien plus de CO2 que ce que les écosystèmes peuventabsorber."
L'augmentation des coûts et la perturbation accrue dans l'accès aux ressources devient alors un "facteur de limitation du bien-être futur", estime le Global Footprint Network qui préconise, à l'issue des deux jours du colloque vénitien, de "mieux prendre en compte, dans les prises de décision, les contraintes des ressources et le déficit écologique".

samedi 27 octobre 2012

ACAA - Accord UE-Israël

Les élus EELV dénoncent un vote indigne du prix Nobel de la Paix

Le 23 octobre 2012, le parlement européen vient d'approuver ACAA*, le protocole relatif à l’évaluation de la conformité et l’acceptation des produits industriels UE-Israël.

L'ensemble des élus EELV au parlement européen a voté contre l'accord ACAA.

*ACAAUne fois approuvé par le parlement européen et entré en vigueur, ACAA, « le protocole relatif à l’évaluation de la conformité et l’acceptation des produits industriels » va être annexé à l'accord d'Association UE-Israël. 
Malgré son aspect technique, ce protocole représente une intensification importante des relations de l’Union européenne avec Israël, et marque un premier pas vers l'intégration d’Israël au sein du marché unique européen en prévoyant le libre accès des produits industriels sur les marchés respectifs des deux parties. Il n’existe aucune garantie que cet accord ne concernera pas les produits des colonies. Lors de ses interventions devant la commission INTA et devant la plénière du Parlement juillet, le commissaire européen au commerce M. De Gucht n'a pas donné des garanties suffisantes qui limiteraient le champ de compétence de l’autorité certificatrice israélienne au territoire israélien reconnu internationalement (frontières de 1967). Cela signifie clairement qu’aussi longtemps que cette grave lacune juridique ne sera pas prise en compte, l'accord ACAA couvrira aussi les territoires occupés. Cela est en contradiction avec le droit international, avec la position de l'Union qui condamne la politique israélienne de colonisation, la qualifiant d'illégale et enfin, avec la décision de l'UE de 2009 de geler le rehaussement de ses relations avec Israël (après l'opération Plomb durci contre Gaza).

Nicole Kiil-Nielsen, députée européenne, membre de la Commission des Affaires étrangères a exprimé son indignation: "ACAA n'est pas un simple accord technique, c'est le renforcement des relations UE/Israël. Donner notre consentement à ACAA c'est admettre et encourager la colonisation illégale des territoires palestiniens, c'est admettre et encourager le blocus illégal et inhumain de Gaza. L'UE ayant déclaré que la colonisation israélienne est un obstacle à la paix, l'adoption de ACAA devra par souci de cohérence nous amener à refuser le prix Nobel de la paix."
Pour Yannick Jadot, député européen:"L'accord tel qu'adopté par le Parlement européen ne garantit pas que les produits qui arriveront sur notre marché ne soient pas fabriqués, pour partie, dans les colonies, contrairement aux dispositions du droit européen. Au moment où le chef du gouvernement, Netanyahu, vient d'annoncer un projet de légalisation des colonies sauvages et d'extension des implantations en Cisjordanie dans la perspective des élections du 22 janvier 2013, le Parlement européen vient d'envoyer un mauvais signal qui va évidemment être perçu pendant cette campagne comme un soutien à la politique de Nétanyahu."




mardi 23 octobre 2012

Convention des écologistes sur les traversées alpines


Convention des écologistes sur les traversées alpines / Convenzione degli ecologisti sui valichi alpini 

Pour une politique des transports à l’échelle de l’arc alpin et adaptée à ses territoires 

Une Convention des écologistes sur les traversées alpines s’est tenue à Chambéry les 19 et 20 octobre.
Elle a traité des principaux enjeux de transport dans et au travers des Alpes et notamment de l'accessibilité des vallées, des déplacements touristiques, d'une réduction des transports de marchandises, du report modal sur le rail, pour y limiter de manière significative automobiles et camions. 
La convention condamne inconditionnellement tous les projets de nouveaux percements ou doublement de tubes routiers : Gothard, Mont Blanc, Fréjus, Tende notamment. 
Concernant la liaison internationale Lyon – Turin, l’infrastructure ferroviaire existante (tunnel du Mont Cenis) permet le report modal que nous appelons de nos voeux, dès à présent et à moyen terme. 
Un nouveau tunnel international n’est donc pas nécessaire, tant que les 
mesures fiscales et sociales favorisant le report modal ne sont pas effectives et tant que la progression constatée du trafic ne justifie pas cette réalisation. 
Les fonds européens doivent être mobilisés sur ce report modal, pour améliorer l’infrastructure existante et l’aménagement des tronçons en France et en Italie (Lyon – Chambéry – vallée de la Maurienne et Turin – vallée de Suse). 
Nous demandons la mise en place, au plan européen, d’une fiscalité dédiée au report modal. 
Cette fiscalité portera sur le trafic poids lourds de l’ensemble du réseau routier. Son montant sera d’un niveau équivalent à la redevance poids lourds liée aux prestations (RPLP) suisse. 
L’enjeu d’un nouveau tunnel est structurant pour les finances publiques, les usages locaux et internationaux, les conditions sanitaires et environnementales. 
Les gouvernements français et italien ne peuvent pas s’engager sur la base d’analyses dépassées, sans un réel débat public à l’échelle de toutes les liaisons franco-italiennes, et avant que le processus de décision européen sur les infrastructures et leurs financements n’ait abouti. 

   Monica Frassoni, coprésidente du Parti Vert Européen.

  Jean-Charles Kohlhaas, conseiller régional Rhône-Alpes pour le comité de pilotage de la Convention.


                                                               


















les idées écologistes sont durablement ancrées dans la société






Fritz Kuhn, premier maire écologiste de Stuttgart


Fritz Kuhn, le candidat des Grünen, est devenu dimanche 21 octobre maire de Stuttgart. C'est une première dans le paysage politique allemand et sans doute européen. Fritz Kuhn a obtenu 52,9% des voix au 2e tour de l'élection municipale.

Un Vert prend la tête de la grande métropole du Bade-Wurtemberg, capitale de l'automobile et de Mercedes, Porsche et Bosch, après que le Vert Winfried Kretschmann a remporté les élections régionales du même Land: le monde politique change en profondeur en Allemagne. Ce nouveau vote démontre en effet que les idées écologistes sont durablement ancrées dans la société.


Au-delà de la défaite infligée à la politique du parti conservateur CDU d'Angela Merkel, qui perd la ville après 37 ans de domination sans partage, ce sont la qualité des thèmes portés par Fritz Kühn - dont un concept de transport intégré combinant covoiturage, transports collectifs, vélos et automobile - et leur réponse aux préoccupations des habitants de Stuttgart qui ont fait la différence.

mercredi 17 octobre 2012

Europe: quelle paix dans l'austérité?


L'Union Européenne vient de recevoir le prix Nobel de la paix et Le Traité européen de stabilité, de coordination et de gouvernance (TSCG) a donc été voté par une large majorité au Parlement français, grâce aux voix de la droite et sans majorité de gauche.
Simple coïncidence? Bien sûr que non. Provocation pour les uns, invitation à mieux faire pour les autres, on eut davantage compris que le peuple syrien bénéficie de l'insigne honneur de ce Nobel.
Mais l'oligarchie semble bien décidé à peser de tout son capital symbolique pour faire accepter aux européens une construction européenne désormais dans l'impasse puisque refusée par un nombre grandissant d'européens eux-mêmes.
Notre dernier message du 29 septembre indiquait ce qui, selon nous, est la véritable finalité du TSCG:En l’absence de politique de change, le TSCG risque surtout d’être utilisé comme une machine de guerre pour une dévaluation interne visant à contraindre les peuples européens à accepter la disparition de politiques sociales et publiques jugées obsolètes et à subir une flexibilité encore accrue du marché du travail: concurrence fiscale, baisse des salaires, des retraites et des cotisations sociales, facilitation des licenciements, atteintes aux droits des travailleurs et des chômeurs, etc."
Dans un entretien réalisé à Washington et publié jeudi 4 octobre par Le Figaro (1), Mme Christine Lagarde, directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) ne dit pas autre chose.
Elle se voit poser la question suivante : « Le FMI tente de faire baisser les prix à l’échelle de la zone euro pour compenser le fait qu’il [l’euro] ne puisse dévaluer. Est-ce réalisable ? » 
En langage plus direct, le journaliste du Figaro, Pierre-Yves Dugua, suggère ceci: dès lors que la parité de l’euro ne dépend plus guère d’une décision des gouvernants européens (comme c’était le cas quand la monnaie d’un pays en situation de déficit commercial pouvait être dévaluée, et une autre, d’un pays en situation d’excédent commercial, réévaluée), la « compétitivité » européenne ne peut plus être rétablie par le biais du taux de change.
Par conséquent, les Etats en quête de « compétitivité » doivent provoquer la baisse des prix de leurs exportations par un biais non monétaire. Et, par exemple, le faire en comprimant les coûts de leur production (salaires, profits, marges des distributeurs, etc.). 
« Est-ce réalisable ? », demandait donc justement le journaliste du Figaro.
Oui, explique en substance la directrice générale du FMI, mais il faut baisser les salaires; c’est d’ailleurs ce que font déjà les Grecs, les Espagnols et les Portugais. Les italiens et les allemands aussi, doit-on ajouter.
Citons Mme Lagarde : « On l’espère, bien sûr [qu’il est réalisable de faire baisser les prix européens pour retrouver de la compétitivité]. Un des signes avant-coureurs du succès de cette approche est la reprise des exportations. En faisant baisser les prix des facteurs de production, en particulier le prix du facteur travail, on espère rendre le pays plus compétitif et plus intéressant pour les investisseurs étrangers. On le voit déjà un peu au Portugal, en Espagne, et on commence à le voir un peu en Grèce (1) ».
Résumons : comme l’euro est une monnaie qu’on ne dévalue pas, la relance des exportations doit passer avant tout par la baisse des prix. Celle-ci découlera principalement de la baisse des salaires, pas de celle des profits, laquelle serait sans doute moins « intéressante pour les investisseurs étrangers ». 
Et l’exemple de cette stratégie que recommande le FMI est déjà donné par les pays d’Europe du Sud. Ceux-là même dont une partie de la population plonge dans la précarité, voire la misère, du fait des politiques d’austérité recommandées par la troïka (Union européenne, Banque centrale européenne et FMI)
Il y a peu, justement, le New York Times évoquait la situation de la Grèce. 
Et le quotidien américain insistait, presque surpris, sur le caractère intraitable du FMI, toujours demandeur de nouvelles baisses des salaires (et des pensions de retraite) à un gouvernement de droite, certes bien disposé à l’égard de l’institution financière et de la troïka, mais un peu las de tailler à la hache dans les salaires, les emplois et les budgets sociaux d’un peuple déjà très éprouvé. 
« De nombreux Grecs parlent à présent de désordres civils quand le froid va s’installer et que beaucoup de gens ne pourront plus payer leur chauffage, indiquait le New York Times. Les prix de l’énergie, y compris de l’essence, ont augmenté, or les Grecs ne peuvent plus tirer sur leur épargne pour absorber ce genre de dépenses. Par ailleurs, on s’interroge sur la disposition de la police à maintenir l’ordre dès lors qu’elle aussi doit subir des baisses de salaires. La semaine dernière, des policiers qui manifestaient devant le bureau du premier ministre ont dû être repoussés par des brigades anti-émeutes (2) ».
Jusqu’à quelle extrémité Mme Lagarde et le FMI comptent-ils aller dans le sens d’une baisse supplémentaire du « facteur travail » en Europe?
Interpellée en novembre 2007 par ceux qui se plaignaient du niveau élevé du prix de l’essence, Mme Lagarde, nommée quelques mois plus tôt ministre de l’économie et des finances par M. Nicolas Sarkozy, avait répondu qu’ils feraient mieux de recourir à un vélo plutôt que de continuer à utiliser — comme elle — une voiture.
Cette fois encore, les conseilleurs du FMI ne sont pas les payeurs : pendant que les Grecs, soucieux de faire baisser le prix de leur « facteur travail », deviendront eux aussi cyclistes (ou entameront un régime alimentaire forcé), Mme la Directrice générale continuera, elle, à gagner 551 700 dollars par an (427 000 euros) — soit 11 % de plus que son prédécesseur. Nets d’impôts, bien entendu. 
A ce prix, on se passerait volontiers des avis du FMI...pour manque de compétitivité.

Cependant, maintenant que le TSCG et la règle d'or ont été voté, que peut-on faire? 

Stéphane Hessel, Pierre Larrouturou et Florence Augier, dans Libération du 8 octobre 2012 posent la bonne question:"Europe: et si on passait à l’action ?" et leur tribune fait écho à nos analyses du 29 septembre: un référumdum européen s'impose, un pacte démocratique, écologique et social est une exigence historique.Lisons leur article:
"En Allemagne, on ne parle que de ça: y aura-t-il un référendum pour approuver les nouveaux traités européens qui seront négociés à partir du sommet des 18-19 octobre ? Ce serait une première historique : il n’y a pas eu de référendum en Allemagne depuis 1945!
Mais à crise historique, réponse historique. L’Europe court à sa perte si nous ne sommes pas capables très vite d’en changer radicalement le fonctionnement démocratique et les règles du jeu en matières sociale, fiscale et écologique. Toutes les rustines posées depuis la chute du Mur, en 1989, ont rendu son fonctionnement insupportable pour les citoyens. 

Et tous les sommets-de-la-dernière-chance convoqués depuis cinq ans ont, certes, permis d’éviter l’effondrement mais ils ne se sont pas attaqués aux causes profondes de la crise : le chômage, la précarité, la baisse de la part des salaires et le dumping fiscal européen. 
En vingt ans, le taux moyen d’impôt sur les bénéfices en Europe est passé de 37% à 25%. Dans ces conditions, faut-il s’étonner que la dette augmente ? Pour toutes ces raisons, les chefs d’Etat vont commencer à négocier de nouveaux traités avec l’objectif de construire une Europe nouvelle. La Grande-Bretagne est de plus en plus tentée de prendre (temporairement ?) ses distances. C’est le moment ou jamais de construire les Etats-Unis d’Europe dont rêvaient Hugo, Schuman, Mendès France et Adenauer. 
En Allemagne, droite et gauche sont d’accord pour un double sursaut démocratique: l’Europe doit être nettement plus démocratique et les nouveaux traités devront être approuvés par les citoyens. La négociation commence les 18 et 19 octobre. MM. Barroso et Van Rompuy sont chargés d’élaborer les feuilles de route. Allons-nous laisser l’avenir de l’Europe entre les mains de MM. Barroso et Van Rompuy? Non. Il faut qu’un maximum de citoyens soit pleinement associé à cette négociation. Quelles que soient ses qualités, François Hollande ne peut pas, à lui tout seul, changer le cours de l’Europe. Certes, il a des alliés dans la négociation (Elio Di Rupo, par exemple, le Premier ministre belge). 
Certes, la droite italienne et la droite espagnole dénoncent régulièrement les politiques d’austérité «imposées par Bruxelles». 
Certes, depuis mars 2007, Angela Merkel demande la mise en œuvre d’un protocole social (c’est Nicolas Sarkozy qui n’en voulait pas) mais la tâche à accomplir est immense pour construire enfin une Europe capable de protéger son modèle social et de peser sur la mondialisation. François Hollande n’y parviendra pas seul. Il faut l’aider à créer un rapport de force. Après trente ans de dérégulation et de bourrage de crâne néolibéral, il y a une vraie bataille intellectuelle à mener. Il faut rassembler nos forces et mettre en commun nos solutions. Voilà pourquoi, dès la fin novembre, nous demandons que les socialistes français invitent toutes les forces citoyennes, politiques, associatives, syndicales qui ont pour objectif de construire une Europe sociale et démocratique à se rassembler. 
Au lieu de nous diviser sur un traité qui n’est que la dernière rustine de la vieille Europe, rassemblons-nous pour faire naître une Europe nouvelle. Ce n’est pas en améliorant la bougie qu’on a inventé l’ampoule électrique. Ce n’est pas en mettant quelques rustines aux institutions conçues il y a soixante ans pour six pays que l’on fera naître une Europe démocratique. «L’élargissement rend indispensable une réforme fondamentale des institutions, affirmait déjà Joschka Fischer, le ministre allemand des Affaires étrangères, en mai 2000. Il faut élaguer les compétences [l’Europe ne doit pas s’occuper de tout] et mettre en place un système entièrement parlementaire.»

Dans le système actuel, sur toutes les questions importantes, il faut que les Vingt-Sept soient d’accord, à l’unanimité, pour qu’on change le contenu d’une politique. La paralysie est donc assurée. Et quand les politiques sont paralysés, ce sont les technocrates ou le marché qui font la loi. Alors que si l’on adoptait un système parlementaire, le vote des citoyens, tous les cinq ans, aurait une influence directe sur les politiques européennes - comme le vote des citoyens lors des élections législatives ou présidentielles dans chacun de nos pays. Pour peser sur la négociation qui commence, rassemblons-nous pour travailler ensemble pendant trois jours sur l’Europe démocratique, un traité de l’Europe sociale, la création d’un impôt européen sur les dividendes, une Europe qui s’attaque enfin aux paradis fiscaux et au dérèglement climatique.
A l’issue de cette rencontre, nous pourrons, tous ensemble, lancer une campagne qui permettra: 
 1) De peser très fortement sur les négociations en cours.
 2) De gagner les élections européennes de 2014.
 Entre 1981 et 1984, la construction européenne fut retardée par une dame, Margaret Thatcher, qui exprimait très fortement ses priorités. «I want my money back !» («je veux mon argent ! Je veux mon argent !»), disait-elle en tapant du poing sur la table jusqu’à obtenir gain de cause.
Pourquoi les citoyens d’Europe ne diraient-ils pas avec autant de force quelles sont leurs priorités ? We want democracy! We want social progress back !(«nous voulons la démocratie ! Nous voulons le progrès social !»)".


(1) « Christine Lagarde : “Je ne crois pas à l’éclatement de la zone euro” », Le Figaro, 4 octobre 2012. 
 (2) « I.M.F.’s Call for More Cuts Irks Greece », The New York Times, 24 septembre 2012. »