dimanche 27 janvier 2013

En Grèce, la culture à mort

Il n'y a pas que les programmes Erasmus qui souffrent des politiques d'austérité infligées par le FMI, la Banque Centrale européenne et la Commission de Bruxelles à la culture et aux échanges culturels et universitaires en Europe.
La décision du gouvernement grec de fermer le Centre national du livre après 19 ans de services suscite un tollé dans les milieux culturels, qui dénoncent un sacrifice de la culture sur l'autel de l'austérité.
Le couperet est tombé avec un récent communiqué du ministre de la Culture, Costas Tzavaras annonçant sa décision de confier "la politique publique du livre à la direction compétente" de ses services.
"Il y a évidemment des raisons financières, mais pas seulement, le fonctionnement du Centre n'était pas jugé satisfaisant, l'idée est de centraliser la politique du livre au ministère, où les services compétents seront revalorisés", a commenté pour l'AFP une source du ministère.
M. Tzavaras, qui avait précédemment destitué la direction du Centre national du livre -Ekebi en grec- en invoquant un écart déontologique dans l'attribution d'un marché public, n'a toutefois pas convaincu.
Une pétition de protestation circule parmi auteurs, éditeurs et intellectuels, tandis que l'Union du livre, qui représente le secteur a vu dans l'annonce ministérielle la preuve du "total manque d'intérêt de l'Etat pour la culture et l'éducation".
Le parti de gauche modérée, Dimar, membre de la coalition gouvernementale, s'est également mobilisé, tout comme le monde académique.
"Cette décision est une stupidité, émanant de cette conception qu'en matière de culture, seuls comptent les monuments, car ils font venir le touriste", assène l'auteur de polars Petros Markaris, dont les romans célèbres dans toute l'Europe dissèquent au scalpel la faillite, financière, mais aussi morale et politique, de la Grèce.
"En période de crise, on ne ferme pas un organisme de culture, c'est au contraire le moment où l'on en a le plus besoin, M. Tzavaras n'avait qu'à réunir les responsables et leur demander des solutions pour parer le manque d'argent", relève-t-il pour l'AFP.
"La fermeture d'Ekebi crée un grand vide, et il est exclu qu'il puisse être comblé par les services du ministère, ce n'est vraiment pas bon pour le profil culturel du pays", juge pour sa part l'agente littéraire Catherine Frangou.
Au ministère, on admet "comprendre cette méfiance", tout en promettant de la démentir.
Contrainte cet automne à de nouvelles coupes dans le secteur public par ses bailleurs de fonds, UE et FMI, la Grèce surendettée a entrepris de fermer ou fusionner quelque 150 organismes publics.
Pendant ce temps, "elle a finalement décidé de maintenir sa participation à l'Eurovision", ironise l'écrivain Christos Homenidis.
Directrice remerciée du Centre, Catherine Velissaris déplore un "vaste mouvement jacobin de recentralisation de toutes les politiques vers les ministères", réputés pour leurs lourdeurs bureaucratiques et clientélistes.

"Tous les secteurs culturels sont touchés", s'inquiète Mme Vélissaris. Elle cite notamment le Festival d'Athènes du spectacle vivant, toujours privé de direction cinq mois avant son ouverture prévue, alors que son précédent directeur, le franco-grec Georges Loukos, en avait fait une success story.
"L'Ekebi coûte peu à l'Etat et lui rapporte beaucoup", ont de leur côté mis en avant ses 35 employés, la plupart en contrats précaires et ayant accumulé des mois de salaires impayés.
Pour 2012, le budget, réduit au minimum, était de 1,5 million d'euros, dont plus de la moitié issus de fonds européens.
Avec un site internet devenu incontournable (Ekebi.gr), l'organisation d'actions ciblées vers le public jeune et d'expositions, le Centre peut se prévaloir d'avoir élargi, notamment à l'étranger, la diffusion des lettres grecques, relayant le dynamisme d'un secteur pourtant handicapé par sa petite taille et sa langue rare.
En son absence, les professionnels s'inquiètent dans l'immédiat de l'avenir de la Foire internationale du livre de Salonique, programmée en avril.
Ils redoutent aussi que la manne financière européenne de soutien à la culture ne se tarisse, faute de partenaire.
Le tout alors que le livre grec est déjà en souffrance, après trois ans de rigoureuse austérité: "les ventes ont chuté de près de 40%, et toute la chaine est asphyxiée par le manque de crédit et de liquidités", relève Mme Vélissaris.
Dans La Croix du 21 janvier 2013,le président du Centre national du livre français Jean-François Colosimo, déplore cette décision : « Ekebi avait été créé sur le modèle de notre CNL et nous avions instauré d’étroites collaborations, accordant des bourses à des auteurs, et soutenant fortement les flux de traductions dans les deux sens. Nous avions, par exemple, lancé en juin 2011 un programme d’aide de 150 000 €, afin de préserver autant que possible ces échanges fructueux entre nos deux pays. La Grèce est un pays de 10 millions d’habitants où l’on traduit autant de livres que dans l’ensemble du monde arabe. Aujourd’hui, la filière du livre en Grèce est en difficulté : les éditeurs ne payent que très difficilement les auteurs. Les libraires ne payent que très difficilement les éditeurs… La perte de cette institution, qui permettait de maintenir une forme de solidarité, est préoccupante. »
Décidement, le renflouement des banques par l'argent des contribuables n'est guère payé en retour et l'Union bancaire semble davantage affairer nos gouvernants que la construction culturelle d'une Europe démocratique.
Pour interdire à l'austérité de nous précipiter dans le tunnel de la destruction politique de l'Europe, il est nécessaire d'abandonner la pieuse illusion de pouvoir sauvegarder les droits civils alors même qu'une compétition fondée sur le pouvoir illimité de la finance déréglementée comprime les droits sociaux, élimine les bases des échanges et de la diffusion culturels, supprime les outils d'avenir de la citoyenneté européenne.
La faillite de l'Europe de Maastricht, Nice et Lisbonne appelle une claire explication d'une stratégie de sortie de la gestion purement monétaire et financière de l'Union.
A quand la révolution écologique et citoyenne de l'Europe?


La suppression très contestée du Centre national du livre grec

La Croix-Jan 21, 2013









lundi 21 janvier 2013

Le blog de Pierre Jestin: CONTRE LA GUERRE AU MALI, POUR UN CESSEZ LE FEU ET...

Le blog de Pierre Jestin: CONTRE LA GUERRE AU MALI, POUR UN CESSEZ LE FEU ET...: Depuis le 11 janvier dernier, suite à des mouvements de groupes armés islamistes vers Bamako, l’armée française est intervenue de manière...

CONTRE LA GUERRE AU MALI, POUR UN CESSEZ LE FEU ET DES NEGOCIATIONS

Depuis le 11 janvier dernier, suite à des mouvements de groupes armés islamistes vers Bamako, l’armée française est intervenue de manière massive au Mali, pays stratégique d'Afrique du Nord-Ouest situé au sud de l'Algérie et à l'Ouest du Niger. Depuis des mois, des terroristes tiennent tout le nord du Mali et se seraient enhardis au point, nous dit-on, de vouloir occuper l’ensemble du pays.
Cependant, le 13 novembre 2012 à l'Elysée, le président de la république française déclarait solennellement: "En aucun cas la France n'interviendra seule au Mali".
Pourquoi -avec quels objectifs- la France s’est-elle engagée militairement au Mali ? Pour empêcher des « terroristes islamistes » de prendre Bamako ? Pour reconquérir le Nord du pays ? Pour rétablir une légalité démocratique, ébranlée par une tentative de coup d’Etat ? Pour contribuer à « la guerre contre le terrorisme »?
Alors qu’en représailles à cette intervention, des djihadistes ont organisé une prise d’otages en Algérie qui semble s’acheminer vers un désastre - plus de 80 morts dont près de 50 otages au lundi 21 janvier 2013- ce sont autant de questions auxquelles l'analyse peut apporter des réponses, alors même que les déclarations officielles à Paris restent floues. 
Décidée dans l’urgence suite à l’appel du Président par intérim du Mali -dont la légitimité démocratique est nulle puisqu’il est en place suite à un coup d’État qui a eu lieu le 22 mars 2012- cette intervention militaire a pris une ampleur inattendue. 
10 jours après l'intervention française, les pays africains tardent à s’engager et les partenaires européens et américain se contentent de promettre un appui logistique. 
De fait, la France est seule et isolée dans cette expédition.

L’expédition au Mali repose donc la question des relations de la France avec le continent africain, de ses responsabilités, de ses méthodes d’action, en un mot de la Françafrique qui, paraît-il, était terminée.


Deuxième interrogation: ne risque t-on pas l'enlisement et les guerres d’Irak et d’Afghanistan ont-elles réduit la menace terroriste ou l’ont-elles, au contraire, alimentée ?

Personne ne niera que ces groupes terroristes djihadistes soient composés individus extrêmement dangereux qui, fous de Dieu fanatisés ou sous prétexte de convictions religieuses , battent et/ou éliminent toute personne - en particulier les femmes- dont le comportement ne leur convient pas ou même pour rien, et sont aussi des trafiquants de drogue et d’armes.

Pour autant, qui peut  croire qu’il s’agit d’une opération "pour la démocratie et la paix au Mali" ? 

Une guerre au Mali et de l’uranium au Niger.
Depuis des décennies la dite démocratie a été constamment bafouée dans ce pays par des régimes corrompus largement soutenus par la France. Alors, pourquoi cette subite urgence "démocratique" ?
De même, qui croira qu’il s’agit de "sécuriser la région" ? En réalité, ne s’agit-il pas essentiellement de sécuriser l’approvisionnement des centrales nucléaires françaises en uranium: ce dernier est en effet extrait dans les mines du nord du Niger, zone désertique seulement séparée du Mali par une ligne sur les cartes géographiques.
Le Niger et le Mali sont -du fait des découpages territoriaux inhumains réalisés par les ex-puissance coloniales- deux pays en forme de sablier, une partie sud-ouest contenant la capitale, totalement excentrée et éloignée d’une immense partie nord-est, principalement désertique.
C’est ainsi que, pendant 40 ans, Areva (auparavant la Cogéma) a pu s’accaparer l’uranium nigérien dans ces mines situées à 500 kilomètres de la capitale, profitant de la "fragilité" du pouvoir politique nigérien maintenu par la France dans un état de dépendance par rapport à l’ancienne puissance coloniale.Ces dernières années, des groupes armés se sont organisés dans cette région: les Touaregs notamment, dépités d’être méprisés et spoliés. Mais aussi des groupes terroristes, certains issus des anciens GIA qui ont semé la terreur en Algérie, d’autres contrôlés par Kadhafi et autonomisés suite à la disparition de ce dernier.
Depuis, les mouvements Touaregs laïques et progressistes ont été combattus et marginalisés, en particulier par la montée en force du groupe salafiste Ansar Dine. Puissant et lourdement armé, ce dernier s’est allié à AQMI (Al Qaeda au Maghreb Islamique), faisant courir un risque de plus en plus évident pour les activités françaises d’extraction de l’uranium au nord du Niger.
L’intervention militaire française "pour la démocratie" est donc une fable qui a 
déjà beaucoup servi. Ajoutons qu'à 27 000 euros l’heure de vol d’un Rafale, le tarif réel du courant d’origine nucléaire est encore plus lourd que ce que l’on pouvait craindre...pas de rigueur ou d'austérité de ce côté là!
Ce positionnement offensif français déjà relevé à propos de la Libye en 2011 et de la Syrie en 2012 comporte de nombreux risques en termes de sécurité et de libertés individuelles et publiques. Il fait de Paris l’ennemi numéro un des djihadistes, le nouveau « grand Satan », avec le risque que ses ressortissants ou implantations à l’étranger, notamment en Afrique, ne deviennent des cibles potentielles -comme en Algérie actuellement-  ou que des objectifs soient visés dans l’Hexagone — ce que ne pourrait sans doute empêcher un dispositif comme le Vigipirate. 

Il convient donc de continuer à penser pendant la guerre et de ne pas se laisser manipuler.

Les intérêts fondamentaux de la France sont-ils en jeu au mali? Non, c’est François Hollande lui-même qui l’a dit lui-même dans son allocution en affirmant que «la France sera toujours là lorsqu’il s’agit, non pas de ses intérêts fondamentaux, mais des droits d’une population ». Est-ce la nouvelle doctrine diplomatique de notre pays? Sa nouvelle doctrine militaire? La France n’a donc pas fini d’intervenir partout. De plus, de quel droit s’agit-il ? Et de quelle population ? Cette phrase du chef de l'Etat  est floue et manque de sens concret. Pourquoi l’a-t-il prononcée ?
Le Parlement a t-il été consulté? Non. Pourtant au moment de la révision constitutionnelle de juillet 2008, le parti socialiste souhaitait -amendement numéro 292- que « le Gouvernement informe le Parlement des interventions des forces armées à l’étranger dans les trois jours qui suivent le début de celles-ci », qu’il «précise les objectifs poursuivis et les effectifs engagés» et enfin qu’il soumette «ses propositions au vote des deux assemblées dans les deux semaines qui suivent leur information ». Il motivait cet amendement en expliquant que « dans une logique démocratique avancée, il est nécessaire que le Parlement se prononce par un vote ». 
Dans les conditions actuelles, je suis favorable à un cessez le feu sous contrôle de l'ONU (casques bleus) et à la suspension des opérations militaires, le temps d'ouvrir les négociations entre les différentes parties.

Il importe de rester vigilant afin de permettre une information libre par les médias qui couvrent le conflit au Mali. 

Il est urgent de:
-préparer avec l'U.E et la communauté internationale un plan de développement ambitieux pour les populations des pays du Sahel, en particulier la reconstruction de leur souveraineté alimentaire et énergétique.
-prendre l'initiative auprès des Nations Unies de la mise en oeuvre urgente d'une conférence pour la paix, pour commencer dès aujourd’hui à mettre en place les conditions d’un retour à la démocratie avec une feuille de route intégrant le calendrier de l’élection du président et du parlement.
-Demander à l’Union européenne de mettre en place de toute urgence une plate-forme d’aide financière et logistique aux ONG internationales et maliennes travaillant sur place pour venir en secours aux populations civiles frappées par la guerre et notamment aux réfugiés et déplacés du nord du Mali;
-prévoir la mise en place de structures permettant l'envoi d'hôpitaux de campagne avec notamment des personnels formés à la prise en compte des viols de guerre.

Si les ressources de l’Afrique suscitent encore bien des convoitises, la volonté occidentale de permettre le développement politique, social et économique du continent africain semble bien absente des décisions françaises, européennes ou des organisations financières internationales. Cependant, seul ce développement peut garantir, à long terme, la stabilité et la paix dans cette région du monde et en Europe.